September 13, 2009

De l'Importance de la ponctuation

Dr. Maite Aragonés Lumeras

Abstract

Punctuation is essential as it is a semantic signpost for the reader. However, under the influence of other languages, translators often imitate the punctuation of the source text and, unconsciously, distort the meaning of the target text. This is a recurring problem that arises in the day-to-day process of translating, especially with poorly written technical source texts. This article aims to provide an aide-mémoire for francophone translators.

Résumé

La ponctuation est essentielle en raison de son utilité comme signalisation sémantique pour le lecteur. Ceci dit, les traducteurs, sous l’influence d’autres langues, calquent souvent la ponctuation du texte de départ et faussent inconsciemment le sens du texte de départ. C’est un problème récurrent qui survient dans l’exercice quotidien de la traduction, notamment avec des textes de départ techniques dont la rédaction est malencontreuse. Cet article vise à proposer aux traducteurs francophones un aide-mémoire.

Entre le point d'exclamation de la vie et le
point d'interrogation de la mort : tout n'est
que ponctuation.
Tristan Maya

La ponctuation est à la communication ce que la signalisation est au trafic ; sans elles, c’est le chaos. Une image vaut mille mots, voilà pourquoi cet exemple, qui a fait le tour du monde, illustre à merveille les dangers et les accidents qu’encourent les utilisateurs et usagers qui ne respectent pas les règles établies.

Un homme riche avant de décéder fit rédiger son testament, mais le notaire, empressé qu’il était de coucher sur papier les dernières volontés du moribond, oublia de ponctuer le texte suivant :

« Je laisse mes biens à ma sœur non à mon neveu jamais sera payé le compte du tailleur rien aux pauvres. »

Le neveu décida de la ponctuation suivante :

« Je laisse mes biens à ma sœur ? Non ! À mon neveu. Jamais sera payé le compte du tailleur. Rien aux pauvres. »

Mais la sœur n’était pas d’accord, elle corrigea le testament ainsi :

« Je laisse mes biens à ma sœur. Non à mon neveu. Jamais sera payé le compte du tailleur. Rien aux pauvres. »

Le tailleur demande la copie de l’original et ponctue le texte de cette manière :

« Je laisse mes biens à ma sœur ? Non. À mon neveu ? Jamais ! Sera payé le compte du tailleur. Rien aux pauvres. »

Là-dessus, les gueux de la ville entrent dans la maison et s’emparent du billet. Ils proposent :
 
« Je laisse mes bien à ma sœur ? Non. À mon neveu ? Jamais ! Sera payé le compte du tailleur ? Rien. Aux pauvres. »

Ainsi va la vie ; elle nous propose une version de l’existence sans point ni virgule, à nous de la ponctuer… Comme c’est la ponctuation qui fera toute la différence, il est judicieux de nous rafraîchir la mémoire afin d’éviter, d’une part, de tomber dans les mauvaises habitudes et de calquer la ponctuation anglaise en français et, d’autre part, de provoquer des contresens lors de traduction.

Il n’est pas inutile de rappeler au traducteur que la ponctuation est l’ensemble des signes qui, dans la langue écrite, servent à délimiter les unités syntaxiques et à repérer les unités de sens. La ponctuation a donc pour but essentiel de faciliter la compréhension du texte. Elle n’est alors pas affaire d’intuition ; il faut, au contraire, accorder une importance toute spéciale à la connaissance des règles et à leur application. Ne perdons pas de vue que la virgule modifie, comme nous venons de le voir dans notre exemple, le sens. Voyons plus précisément les règles de ponctuation.


Le point, le point d'interrogation et le point d'exclamation
  • Le point marque la fin d'une phrase (pause forte).
  • La phrase interrogative est terminée par un point d'interrogation.
  • La phrase exclamative est terminée par un point d'exclamation. Les phrases impératives peuvent également être terminées par un point d'exclamation.

Les points de suspension

Ils marquent une interruption, une pause dans la parole, l'emphase, ou l'interruption volontaire d'une phrase (réticence) ou d'une énumération.

    La virgule
       La virgule est une courte pause. Elle permet de :
      • coordonner plusieurs éléments de même fonction ;
      • détacher un mot ou un groupe de mots :
                —› apposition :
                           - du syntagme nominal : Martine, sa sœur, a lu
                             le dictionnaire cinq fois.
                           - de l'adjectif : Elle attendait, impatiente, les
                             résultats de ses examens.
                           - de la proposition subordonnée relative : Les
                             résultats de l'examen, qui sont publiés demain,
                             sont très attendus.
                —› thématisation : Le dictionnaire, elle le connaît par cœur.
                —› emphase syntaxique : Ce livre, qu'est-ce qu'il est long !
                —› proposition incise : « Je lis ce dictionnaire », dit-elle, 
                      d'un air agacé.
      • Elle ne doit pas se placer entre le GN et le verbe.
      • On ne met pas de virgule entre la phrase enchâssante et une subordonnée complément de phrase si cette dernière est placée après cette phrase. Ex. « Le président a dû démissionner parce qu’il a été convaincu de favoritisme ».
      • On emploie la virgule devant une conjonction de coordination : « Il aimerait bien se rendre en Espagne, mais sa crainte de l’avion l’en empêche ».
      • En revanche, on ne met pas de virgule devant « et », « ou »,  « ni » si ces conjonctions ne sont employées qu’une seule fois. Si ces conjonctions sont répétées on mettra une virgule : « Le prix de l’essence dépend ou de l’offre, ou des rapports entre pays, ou encore des intérêts financiers des producteurs.
      • La subordonnée relative déterminante se joint directement à son antécédent sans virgule : « La femme qui a divorcé doit pouvoir récupérer son nom de jeune fille ».
      • La relative explicative doit être encadrée par des virgules :     « La femme, qui porte le chapeau rouge, a eu un accident ».

        Le point-virgule

        Le point-virgule marque une pause de moyenne durée. Dans la phrase, il peut jouer le même rôle qu'une virgule, notamment pour séparer des parties d'une certaine étendue. Le point-virgule peut également unir des phrases grammaticalement complètes, mais logiquement associées. Le point-virgule sépare les éléments qui font partie de la même unité syntaxique.


        Les deux points
          Les deux points s'emploient pour :
          • introduire un discours rapporté (citation) ;
          • introduire une énumération ;
          • ou encore introduire une explication.

          Les guillemets, les tirets et les parenthèses
            • Ils servent à ponctuer le discours rapporté (citation).
            • Il existe des guillemets français (« »).
            • Le tiret (—) ne doit pas être confondu avec le trait d'union (–). Dans un dialogue, il signale un changement d'interlocuteur.
            • Les parenthèses renferment généralement un commentaire, une précision ou une rectification.

            La question des espaces
              • « Espace », dans son sens typographique, est du genre féminin.
              • Il y a une espace entre les mots d'une phrase et entre les phrases.
              • Il y a zéro espace avant et après une apostrophe.
              • Il y a zéro espace avant la virgule, mais il y en a une après.
              • Il y a une espace avant et après les deux points, de même que pour les guillemets (sauf guillemets anglais où il n'y a qu'une espace avant pour le guillemet ouvrant et une espace après pour le guillemet fermant). Il en est de même pour le point-virgule et le tiret.
              • Pour les parenthèses : une espace avant pour la parenthèse ouvrante et une espace après pour la parenthèse fermante.
              • Le point n'est pas précédé d'espace, mais il y en a une après.
              • Pour les points d'interrogation, d'exclamation et le point-virgule : une espace avant et une espace après.
              • Il n'y a pas d'espace avant les points de suspension, mais il y en a une après.

              Bibliographie
              1. Grevisse, M. et Goosse A. (1995), 3e édition, Nouvelle Grammaire française. Duculot. 
              2. Leconjugueur.com/frponctuation.php (consultée le 18 juillet 2008). 
              3. Synapse-fr.com/typographie (consultée le 27 juin 2008).
              4. « La ponctuation, parent pauvre des lettres » [article 1, article 2] sur le blog des correcteurs du Monde.fr. (consultée le 10 juin 2008).

              Maite Aragonés Lumeras has been a translator and reviser at the World Intellectual Property Organization since 1998, working in Chinese, French, Spanish, and English. She is also a professor in Spain and Switzerland. She worked as a freelance translator for several international companies, including China Pictorial and Nestlé. She translated Wang Shuo's novel Vous êtes formidable! into French, and has written a book on translation methodology, Estudio descriptivo multilingüe del resumen de patente: aspectos contextuales y retóricos. She has a PhD in translation studies and communication from the Universitat Jaume I.
              Contact: maite.aragones@wipo.int 
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              1 comment:

              1. Excellent sujet.
                Si je peux humblement ajouter un recueil de référence : Lexique des règles typgraphiques. Publié par l'imprimerie nationale, c'est la bible de tous les éditeurs français.
                Mis à jour régulièrement, on y trouve absolument tout ce qu'on cherche.
                ISBN 2-7433-0482-0
                Inutile (?) de préciser, cependant, que les règles ne s'appliquent qu'au français de France.

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